Les Réseaux de surveillance sismique dans les Pyrénées

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Cycle sismique, failles et ondes sismiques

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Les failles et le cycle sismique

Épicentre et hypocentre

Un séisme tectonique se produit le long d'une faille, mais la rupture n'affectera en général qu'une partie de cette faille.

L'hypocentre, ou foyer, est le point précis de la faille où commence la rupture. Il est le plus souvent situé en profondeur, et se décrit au moyen de trois coordonnées de l'espace : latitude, longitude et profondeur focale.

L'épicentre est la projection de l'hypocentre à la surface de la Terre. Lorsque l'on se trouve à l'épicentre d'un séisme, l'hypocentre se trouve quelque part à la verticale sous nos pieds. On n'a besoin que de deux coordonnées horizontales, latitude et longitude, pour décrire un épicentre.

Le cycle sismique et le modèle du rebond élastique

Les mouvements de plaques à grande échelle engendrent localement des accumulations de contraintes accompagnées de déformations concentrées au voisinage immédiat des failles. Lorsque le seuil de résistance des roches est atteint, un glissement brutal se produit le long du plan de faille ; en quelques secondes, la rupture se propage, puis s'arrête : c'est le séisme, épisode quasi-instantané, qui permet de relâcher les contraintes. Le cycle peut ensuite recommencer.

L'animation ci-dessus représente ce cycle dans le cas le plus simple : celui d'une faille purement décrochante (coulissage pur le long d'un plan de faille vertical). Imaginons une haie traversant perpendiculairement cette faille. Durant la phase d'accumulation des contraintes, cette haie sera déformée et verra donc son bel alignement perturbé. Le séisme rétablira deux alignement décalés, et il faudra probablement replanter un ou deux arbres...

L'immense majorité des séismes est d'origine tectonique, c'est-à-dire se produit le long de failles. Une faille peut être décrite comme un objet à deux dimensions, une fracture quasi-plane dans la roche, le long de laquelle il s'est déjà produit un déplacement par le passé, et qui constitue de ce fait une zone de faiblesse. Les failles actives obéissent aux principes de base du phénomène de charge/décharge appelé cycle sismique, décrit dans l'encadré de droite.

Ce modèle, dit du rebond élastique, s'applique aux trois principales familles de failles tectoniques, qui sont les failles inverses, les failles normales, et les failles décrochantes. La distinction entre ces trois objets tectoniques se fait suivant le mouvement relatif des deux compartiments de part et d'autre de la faille :

Naturellement, l'immense majorité des failles observées dans la nature ne relève pas de l'un de ces trois cas élémentaires, mais plutôt d'une combinaison de deux d'entre eux.

Trois familles de failles

Failles inverses

On observe à la fois un mouvement horizontal de rapprochement, et un mouvement vertical relatif des deux blocs. Ce genre de faille est caractéristique des contextes tectoniques de subduction (enfoncement sous une autre plaque d'une plaque océanique) et de collision continentale, lorsque deux plaques s'affrontent.

Failles normales

Les deux blocs s'éloignent l'un de l'autre. On trouve des failles normales en régime tectonique extensif, comme par exemple le long des dorsales océaniques, là où les plaques s'écartent sous la pression du matériau en provenance du manteau. On en trouve aussi en domaine continental, en particulier dans les plaines d'effondrement et les rifts continentaux.

Failles décrochantes

Le plan de faille est vertical ou quasi-vertical. On observera des failles décrochantes par exemple à la frontière entre deux plaques qui se déplacent en coulissant l'une par rapport à l'autre, sans rapprochement ni éloignement. C'est le cas de la célèbre faille de SanAndreas, en Californie.

Magnitude et intensité

Échelles d'intensité

Les effets des séismes sont décrits grâce à des échelles similaires à l'échelle de Beaufort qui sert à mesurer la force du vent en mer. L'échelle actuellement utilisée officiellement en France est l'échelle EMS98 (European Macroseismic Scale), qui est dérivée de l'échelle plus ancienne MSK (Medvedev - Sponheuer - Karnik, du nom de ses initiateurs). Elle comprend 12 degrés gradués de I à XII.

L'estimation de l'intensité d'un séisme en un endroit donné se fait selon une procédure très codifiée dans laquelle entrent en ligne de compte :

  • la classification des bâtiments éventuellement endommagés suivant la qualité de leur construction et les matériaux utilisés
  • le degré d'endommagement des bâtiments (de dommages légers à destruction totale)
  • les proportions de bâtiments endommagés ou de personnes ayant ressenti le séisme

Le tableau suivant décrit très sommairement l'échelle EMS98 (cliquez pour une version illustrée).

degré description
I Non ressenti
II Rarement ressenti
III Faiblement ressenti
IV Largement ressenti
V Fortement ressenti
VI Dégâts légers
VII Dégâts significatifs
VIII Dégâts importants
IX Destructions
X Destructions généralisées
XI Catastrophe
XII Changement du paysage
illustrations de D. Fuster

Attention aux confusions

Une confusion est souvent faite entre la magnitude et l'intensité d'un séisme.

  • La magnitude est une mesure de la taille d'un séisme, c'est-à-dire de l'énergie libérée lors de ce séisme. Elle dépend essentiellement des dimensions de la surface de rupture du séisme, et de la longueur du glissement sur le plan de faille.

  • L'intensité est une estimation des effets en surface du séisme. Sur le croquis ci-dessus, on voit bien qu'un séisme de forte magnitude (à gauche) peut commettre moins de dégâts qu'un séisme de magnitude moindre (à droite), par exemple s'il est très profond.


Plusieurs paramètres caractéristiques des séismes sont intimement liés ; c'est le cas de la durée de la rupture, sa surface (c'est-à-dire la surface du coulissage le long du plan de faille), ou encore sa magnitude, paramètre intrinsèque le plus utilisé pour décrire un séisme, et qui est une mesure de sa force.

Le calcul de la magnitude est réalisé à partir des enregistrements des mouvements du sol consécutifs à ce séisme, ou sismogrammes. Pas de sismogramme, pas de magnitude ! Il existe plusieurs modes de calcul de cette grandeur, qui utilisent soit l'amplitude des signaux enregistrés (magnitude locale ou de Richter, magnitude des ondes de surface, magnitude des ondes de volume), soit leur longueur (magnitude de durée), soit l'énergie totale rayonnée (magnitude d'énergie, obtenue grâce une analyse poussée des signaux). Chacune de ces magnitudes est une quantité logarithmique : une augmentation d'une unité en magnitude correspond à une augmentation d'un facteur au moins 10 de l'amplitude des mouvements du sol. En général, l'emploi d'un certain type de magnitude est lié à la taille du séisme : les magnitudes locale et de durée sont adaptées à la mesure des « petits » séismes (jusqu'à la magnitude 5 ou 6), alors que seule la magnitude d'énergie sera apte à caractériser un très gros séisme (au-delà de 8,5). Cette embarrassante multiplicité d'échelles de magnitudes tient au fait que le mode de calcul dépend des caractéristiques de l'appareil enregistreur qui lui-même ne sera pas adapté à la mesure de n'importe quel séisme.

Une erreur fréquente

UN SÉISME DE DEGRÉ 8,2 SUR L'ÉCHELLE DE RICHTER QUI EN COMPTE 10"

  1. le degré d'un séisme n'existe pas. On parle soit de magnitude, soit d'intensité.
  2. l'échelle de Richter n'est plus valable pour les très gros séismes ; en pratique, une magnitude donnée comme supérieure à 6 par les sismologues ne peut pas être une magnitude de Richter - c'est probablement une magnitude d'ondes de volume, d'ondes de surface ou d'énergie.
  3. les échelles de magnitude ne sont pas bornées ; on peut simplement estimer que la magnitude d'énergie maximale envisageable est de l'ordre de 10. Quant à l'échelle d'intensité macrosismique, elle est, elle, bornée et graduée de I à XII.

Que faut-il dire alors? Simplement : un séisme de magnitude 8,2.

En théorie, et contrairement à certaines idées reçues, il n'existe pas de borne inférieure ni supérieure à la valeur de la magnitude. En pratique, comme la magnitude d'un séisme est liée à la longueur de faille qui rompt lors de ce séisme, la gamme des magnitudes sera limitée par la géométrie des frontières de plaques ; on peut envisager une rupture de quelques milliers de kilomètres au plus, ce qui correspondrait à un séisme de magnitude 10 environ (magnitude d'énergie). Le plus gros séisme enregistré (Chili, mai 1960) avait une magnitude de 9,5. La borne inférieure est imposée par la sensibilité du sismomètre ; des séismes de magnitude négative sont ainsi fréquemment détectés. La chute d'une brique d'une hauteur de 1 m pourra être assimilée à un séisme de magnitude -2 !

La magnitude d'un séisme ne doit pas être confondue avec son intensité macrosismique. Alors que la magnitude est une grandeur intrinsèque uniquement liée à la taille du séisme, l'intensité décrit localement les effets en surface, notamment les dommages aux constructions. Elle se mesure en un point précis , et se décline grâce à une échelle bornée graduée de I à XII (en chiffres romains). La distinction est fondamentale : un séisme de grande magnitude pourra avoir une intensité faible, par exemple s'il est profond ; au contraire, un séisme de magnitude relativement restreinte pourra avoir localement des effets importants en surface (phénomènes locaux d'amplification), et donc présenter localement une intensité élevée. En général, on décrit un séisme par son intensité maximale.

Les ondes sismiques

Ondes P et ondes S

Les deux principales ondes élastiques engendrées par un tremblement de Terre s'observent très facilement sur les enregistrements des stations proches.

L'onde P, qui s'est propagée à une vitesse de l'ordre de 6 km par seconde, arrive la première. D'amplitude modérée, elle occasionne un mouvement vertical du sol, moins perceptible que celui accompagnant l'onde S. Elle donne parfois lieu à des manifestations sonores ("coup de canon" pour un séisme profond à courte distance, "grondement sourd" à plus grande distance).

L'onde S arrive après l'onde P, car sa vitesse de propagation est plus faible, de l'ordre de 3.5 km/s. Son amplitude et ses périodes caractéristiques sont plus grandes que celles de l'onde P. Elle s'accompagne d'un mouvement horizontal de cisaillement du sol, fortement ressenti.

Dans certains cas, les personnes habituées à ressentir des séismes pourront estimer leur distance (en kilomètres) par rapport au foyer, en multipliant par 8 l'intervalle de temps (en secondes) entre le bruit de l'onde P et le mouvement horizontal de l'onde S. C'est un calcul similaire à celui de la distance qui nous sépare d'un orage, à partir de l'intervalle de temps entre éclair et tonnerre.

Jusqu'ici, nous n'avons parlé que de la source même d'un tremblement de Terre, c'est-à-dire la région très localisée où se produit une rupture le long d'une faille. Or les effets d'un séisme se font sentir à des distances parfois très importantes de la source et, malheureusement, les dégâts ne restent pas confinés à la faille elle-même.

La brusque rupture d'une faille ou d'un segment de faille provoque des vibrations qui se propagent de proche en proche à travers les roches : ce sont les ondes sismiques. Lorsqu'elles arrivent en surface, ces ondes font subir au sol un mouvement d'oscillation qui, selon son amplitude et sa fréquence, pourra occasionner des dommages aux constructions.

Les ondes sismiques sont des vibrations de type élastique, qui peuvent être réparties en deux grandes familles : les ondes P, ou primaires, et les ondes S, ou secondaires. On les appelle ondes de volume, car elles se propagent dans tout le volume de la Terre. Sur le passage des ondes P, les roches sont alternativement comprimées et détendues comme un ressort. Ces ondes se propagent à travers tous les types de milieux, y compris les liquides et les gaz. Les ondes sonores, en particulier, sont des ondes de type P. Les ondes S, elles, sont des ondes cisaillantes : les matériaux traversés sont distordus puis retrouvent leur forme initiale. Ces ondes ne peuvent donc se propager que dans les milieux qui offrent une résistance à la distortion, c'est-à-dire les solides.

Plus rapides que les ondes S, les ondes P sont les premières observées sur un enregistrement, ou ressenties à proximité d'un séisme. Elles sont suivies par les ondes S, qui ont une amplitude plus importante et des fréquences plus basses.

Il existe également des ondes dites de surface, ainsi nommées car leur trajet se déroule uniquement dans les couches superficielles de la Terre. Elles sont produites par interférence d'ondes de volumes P et S. A grande distance, ou dans le cas de séismes proches de la surface, ce sont elles que l'on voit le mieux sur les enregistrements.

Les dégâts infligés aux constructions lors d'un séisme peuvent avoir des causes directes et évidentes, comme l'ouverture d'une crevasse sous un bâtiment, mais c'est en général le passage d'ondes sismiques de type S (ou de surface) qui provoque des oscillations horizontales du sol dommageables aux structures.


Effets de site

Intuitivement, on s'attend à ce que l'éloignement soit la meilleure protection contre un séisme, et le plus souvent les mouvements du sol s'atténuent effectivement avec la distance au foyer. Mais dans bien des cas, la vulnérabilité des constructions est accrue par leur emplacement, ou leurs caractéristiques géométriques et mécaniques.

En premier lieu, on observe des phénomènes très locaux d'amplification ou d'atténuation des mouvements sismiques : ce sont les effets de site. La nature des sols joue par exemple un rôle fondamental : un sol meuble (alluvions, sédiments mal consolidés) pourra amplifier considérablement les mouvements par rapport à un socle rocheux. On constate par ailleurs des effets topographiques : les mouvements sont beaucoup plus forts sur les reliefs (collines) que dans les vallées (si elles ne sont pas remplies d'alluvions).

Résonance

De façon générale, plus un bâtiment est haut, plus il est sensible aux basses fréquences de vibration du sol. Ainsi que le représente l'animation ci-contre, une maison d'un ou deux étages (fréquence propre : 5 Hz) n'aura pas le même comportement qu'un immeuble de dix étages (fréquence propre : 1 Hz).

En second lieu, on peut observer des phénomènes de résonance. En effet, tout bâtiment possède une fréquence propre d'oscillation,qui dépend de ses caractéristiques géométriques (sa forme) et mécaniques (sa rigidité, sa masse). Au passage d'ondes sismiques, il réagira très différemment selon les fréquences dominantes de ces ondes. En particulier, si ces fréquences sont proches de sa fréquence propre, il court le risque d'entrer en résonance, c'est-à-dire de voir ses mouvements amplifiés de façon importante, voire dramatique. Ainsi, lors du séisme de Michoacan de septembre 1985, on a pu voir certains immeubles de Mexico entrés en résonance se cogner les uns aux autres. Il faut malheureusement préciser que les ondes S présentent très souvent des fréquences dominantes proches des fréquences de résonance des bâtiments.


Pour terminer sur une note un peu plus optimiste, reconnaissons l'utilisation positive qui est faite des séismes dans le cadre de la sismologie. Cette science exploite les tremblements de terre comme source d'ondes sismiques, comme l'optique exploite le soleil, une lampe ou un laser comme source lumineuse, et s'attache à l'étude de ces ondes.

Les ondes sismiques engendrées par les gros séismes peuvent traverser la Terre de part en part en conservant suffisamment d'énergie pour être enregistrées et décryptées à la surface. C'est grâce à la sismologie que l'on connaît avec précision la structure interne du globe.

La terre au scanner

Lorsqu'un séisme se produit, une partie de l'énergie libérée prend la forme d'ondes élastiques qui se propagent à travers la Terre, la traversant de part en part comme un rayon lumineux traverse une boule de cristal.

Depuis la fin du XIXème siècle, on sait enregistrer ces ondes à la surface. Lorsqu'elles émergent, elles sont chargées d'informations sur les régions visitées : la durée de leur trajet, leur amplitude, leur contenu fréquentiel, la façon dont elles mettent les particules en mouvement apportent des indices fondamentaux sur la géométrie et la composition des couches traversées.

La sismologie est probablement l'outil le plus efficace pour l'étude des profondeurs de la Terre.